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18-Un Coup De Chasse-Mouches

D'autant plus impitoyable qu'elle se sent menacée, la Régence durcit sa pression. Elle compense ses déficits sur mer par de terribles exigences fiscales, et cer­taines tribus, réduites à la mendicité, sont en état de révolte permanente. Les confréries religieuses, très influentes, poussent à la résistance. La haine du régime est générale. À l'extérieur, les puissances européennes supportent de plus en plus mal de voir leur autorité narguée par une bande d'aventuriers; les unes et les autres envisagent une intervention militaire. En 1808, Napo­léon a même mis au point un plan de débarquement. Entre la France et la Ré­gence, les relations se tendent : bateaux capturés, comptoirs pillés. Une affaire commerciale va servir de prétexte à l'expédition d'Alger. Ravitaillée en blé par la Régence pen­dant la révolution de 1789, la France du Directoire doit quelque 2 millions de francs à ses fournisseurs, deux Juifs livournais, Bacri et Busnach, qui ont servi d'intermédiaires. La facture s'enfle démesurément au cours des ans et atteint 24 millions à la chute de l'Empire! Une négociation amorcée sous Louis XVIII fixe le solde à 7 millions. Criblés de dettes, Bacri et Busnach reçoivent 4 mil­lions, tandis que le dey, dont les besoins d'argent sont pressants, réclame à son tour sa part, en tant que créancier des Bacri : les grains n'appartiennent-ils pas à la Régence?

Nouvelle procédure, nouvelles forma­lités. Hussein se plaint des lenteurs et des complications du droit français, persuadé qu'on le gruge. Et le 30 avril 1827, alors qu'il reçoit le consul de France Deval, exaspéré, il frappe son hôte d'un coup de chasse-mouches. Deval ne bronche pas sous l'insulte, mais il adresse le soir même une note à Paris pour qu'on donne à cette affaire « la suite sévère et tout l'éclat qu'elle mérite »! La réparation tarde à venir. La France envoie bien l'amiral Collet et son esca­dre exiger des excuses, Hussein ne répond pas. On établit un blocus mari­time; le dey riposte en attaquant les comptoirs. Seul un débarquement de troupes intimiderait la Régence. Mais à Paris, beaucoup de ministres sont hos­tiles : on craint des complications diplo­matiques avec les Anglais. Paris envoie messager sur messager à Alger, mais le dey, dûment chapitré par les Anglais, refuse tout geste de conciliation. Plus grave : il canonne le vaisseau du com­mandant de La Bretonnière, tandis que celui-ci remonte à son bord, après l'échec des négociations. Le commandant a le sang-froid de ne pas répondre. Mais cette fois, Paris ressent gravement l'outrage. Dédaignant les menaces de l'Angleterre, qui craint surtout un suc­cès français en Méditerranée, le roi Charles X ordonne, le 7 février 1830, une expédition contre la Régence : un succès militaire redonnerait un peu d'éclat à sa politique. Et le 14 juin, 36 000 hommes, sous le commandement du général de Bourmont et de l'amiral Duperré, débarquent à Sidi-Ferruch. Les premiers engagements sont acharnés, et c'est l'artillerie française qui emporte la décision. Le 4 juillet, les batteries ouvrent le feu sur Fort l'Empereur, la dernière défense avant Alger. Soudain, une énorme détonation : les Algériens ont dynamité leur forteresse. Dès lors, la ville, en contrebas, ne peut plus tenir.

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