Cependant, les atermoiements de la métropole et l'égoïsme des
intérêts particuliers
nuisent gravement à cette première période de la colonisation. Les campagnes n'assurent que des résultats précaires, et la pacification est toujours à recommencer. La résistance indigène prend la forme de guerre sainte, et, en Oranie, un jeune chef nommé Abd el-Kader se met à la tête des tribus révoltées.
Fils d'un marabout vénéré,
chef de la tribu des Hachem, Abd el-Kader a grandi
près de Mascara. Il reçoit une solide instruction coranique et fait le pèlerinage
de La Mecque. En 1832, à la suite des remous causés par la domination
au beylicat d'Oran d'un prince tunisien dévoué aux Français, il prend les
armes aux côtés de son père et attaque Oran. La bravoure du jeune homme,
son intelligence, sa foi, la magie de sa parole le font
choisir pour émir. Son investiture est accompagnée de toutes sortes d'oracles destinés à impressionner ses
fidèles. Le jeune émir organise une armée régulière, lève l'impôt, menace les
tribus récalcitrantes. Il a l'étoffe d'un fondateur d'empire, mais il n'est encore
qu'un chef de tribu, contesté
à Tlemcen, ignoré à Mostaganem, combattu à
Arzew. C'est alors qu'un officier
supérieur fraîchement débarqué, le général Desmichels, passant par-dessus l'autorité du commandant Voirol, propose au ministre de la Guerre d'engager des pourparlers de paix
avec l'émir. Celui-ci ne répond d'abord pas aux avances; puis, devant l'insistance de Desmichels, il annonce aux
marabouts et chefs de tribu que l'ennemi demande la paix, c'est-à-dire qu'il renonce à la guerre! Le traité, établi en février 1834, proclame l'arrêt des « hostilités », et par clause secrète, ignorée
du gouvernement, Desmichels assure le droit
à l'émir de se ravitailler en poudre et en armes dans les villes françaises. Hier chef de tribu, l'émir est aujourd'hui traité en « commandeur des croyants »; il parle au nom d'un peuple et devient le seul interlocuteur du roi des Français.
Dans sa hâte de
« faire tourner au profit de la France la puissance de l'émir », Desmichels vient de
renforcer considérablement cette puissance. Abd el-Kader rallie alors les hésitants, entreprend des travaux
de fortification autour de sa capitale, Mascara, se révèle un excellent, administrateur.
On reconnaît son autorité jusqu'à Alger.
Le traité n'a en fait réglé aucun problème et
la guerre sainte reprend de plus belle. Les affrontements se succèdent : les Français
subissent une grave défaite dans les marais de la Macta (juin 1835), défaite
vengée par le maréchal Clauzel, qui prend et détruit
Mascara. Puis ce sont de nouveaux succès d'Abd el-Kader, à
l'embouchure de la Tafna, où le général d'Arlanges s'est laissé bloquer, alors qu'il voulait ravitailler Tlemcen. Devant cette
situation critique, Louis-Philippe décide
d'envoyer des renforts sous le commandement de Thomas Robert Bugeaud de
la Piconnerie.
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